Thursday, May 06, 2010

LES VERITABLES CONSEQUENCES ECONOMIQUES ET SOCIALES DU COTON Bt DE MONSANTO


Coton Bt: les faits derrière le battage publicitaire

Source de l’article: http://www.grain.org/seedling/?id=475

Cela fait maintenant plus de dix ans que le coton génétiquement modifié Bt est commercialisé. Il a été depuis introduit et testé dans plus de vingt pays. Sa culture est un succès évident pour Monsanto, la principale entreprise de coton Bt. Mais qu'est que cela a signifié pour les agriculteurs? On peut avoir aujourd'hui une vision plus claire de ce qui se passe dans les fermes dans de nombreux pays à travers le monde.

Début novembre 2006, l'Institut national de recherche agricole du Burkina Faso a invité un groupe de journalistes, de scientifiques et d'agriculteurs sur un site d'essais de coton Bt dans la ville de Boni. On leur a montré deux petites parcelles de terre sur une ferme appartenant à Sofitex, la plus grosse entreprise cotonnière du pays. Sur l'une était planté du coton génétiquement modifié Bt et sur l'autre une variété conventionnelle. Il n'était pas difficile de voir la différence: le champs de coton Bt avait une meilleure production et il avait subi moins de dommages dus aux insectes, alors que, d'après les chercheurs, le coton Bt n'avait été traité que deux fois avec un pesticide alors que le coton conventionnel l'avait été six fois.
La démonstration était suffisante pour convaincre un grand nombre d'agriculteurs présents. "Je pense que nous pouvons maintenant nous lancer dans la culture du coton Bt, vu le résultat des expérimentations à Boni," a déclaré Sessouma Amadou, un cultivateur de coton de la région de Kénédougou. "Maintenant, mon souci, c'est de savoir comment me procurer les semences, et à un bon prix.

Les premiers résultats de ces petits essais en champs ont aussi été suffisamment convaincants pour le gouvernement du Burkina, qui a saisi l'occasion pour déclarer à la presse qu'il avait l'intention d'avancer dans la commercialisation du coton Bt pour la saison suivante, deux ans avant de terminer les recherches en biosécurité programmées[1].

Un mois plus tôt, dans une autre partie du pays, les champs de coton d'un projet très différent – visant à réduire l'usage des pesticides – étaient aussi présentés, bien que suscitant moins d'attention de la part du gouvernement et des médias. Les agriculteurs y montraient les résultats de la seconde année d'un programme intégré de contrôle des insectes, basé sur un modèle de ferme-école, où les agriculteurs ont développé des pratiques de contrôle des insectes en partageant les connaissances et en utilisant les moyens locaux. Et dans le cas présenté, les agriculteurs avaient complètement éliminé le recours aux pesticides chimiques dans leurs champs de coton sans réduire leurs rendements. [2]

Dans le Mali voisin, les agriculteurs ont obtenu les mêmes succès, avec leur programme, intitulé Projet de Gestion Intégrée de la Production et des Déprédateurs – GIPD, qui en est maintenant à sa quatrième année. Lors de la saison 2006, 1140 cultivateurs ont participé au programme. Leur production moyenne fut nettement supérieure à celle des cultivateurs de la même région utilisant des pesticides conventionnels (1240 kilos par hectare contre 1020 kilos), alors que les agriculteurs du GIPD n'avaient pas utilisé de pesticides chimiques. [3]

Un agronome du Bénin qui a visité les champs au Mali pendant la saison 2005-6 a déclaré: "C'est presque impossible de croire ce que nous avons vu. Des champs épargnés par les insectes, avec des plants de coton pleins de capsules intactes; on avait l'impression d'être dans des champs traités avec des pesticides."

L'un des gros avantages du programme GIPD est qu'il ne dépend pas des technologies coûteuses des multinationales comme Monsanto ou Syngenta. Un avantage supplémentaire, qui devient de plus en plus important, est que sa viabilité est prouvée dans les champs des cultivateurs, tandis que les essais de coton Bt sont menés uniquement par des scientifiques dans l'environnement artificiel des stations de recherche.

Aujourd'hui, dix ans après que le coton Bt a été introduit pour la première fois, il ne devient que trop évident que la différence peut être considérable entre ce que ces scientifiques rapportent et de qui se passe réellement à la ferme, en particulier sur le long terme. Dans les pays où le coton Bt est cultivé depuis plusieurs années, l'énorme battage publicitaire des multinationales sur leur nouvelle merveille est noyé dans la mer des dettes contractées par les cultivateurs et les problèmes de nuisibles et de maladies. Tableau:

Implantation du coton Bt dans le monde

Afrique du Sud: Autorisé en 1997.

Argentine: Autorisé en 2001. En 2005-6, il a été semé sur 13% de la totalité de la zone de production du coton.

Australie: Introduit en 1996. En 2002–3, se montait à presque 30% de la totalité des cultures de coton. Cela s'éleva à 80% en 2004–5 avec la diffusion de la variété Bollgard II de Monsanto.

Brésil: Les essais en champs ont été autorisés en mars 2005. La contrebande de semences de coton Bt en provenance d'Argentine et du Paraguay est très répandue. Au moins 5% des 1,3 millions de tonnes produites dans la saison 2005-6 proviennent des variétés Bt du marché noir.

Burkina Faso: Les essais en champs ont commence en 2003. La diffusion commerciale est prévue pour 2007.

Chine: Diffusé en 1997. Il est maintenant cultivé sur une bonne moitié de la zone de production de coton du pays.

Colombie: Importé par Monsanto en 2002, sans autorisation environnementale. Les actions en justice ont abouti à une suspension de l'autorisation.

Costa Rica: Monsanto a commence des essais en champs sans la surveillance réglementaire en 1992. En 2004, 638 ha ont été plantés, principalement pour l'exportation des semences.

Egypte:Introduction commerciale autorisée en 2006.

Etats-Unis: Autorisé en 1996. Couvre actuellement 40% de la zone de production du coton.

Guatemala: Essais en champs.

Inde: Introduction commerciale en 2002. En 2006–7, Monsanto a commence à mettre en vente le Bollgard II.

Indonésie: Introduit dans la province du Sulawesi du sud en 2001. Deux ans plus tard, il a été retiré après que son échec ait déclenché des manifestations des cultivateurs.

Kenya: Essais en champs.

Mexique: Autorisé en 1996.

Pakistan: En mai 2005, la Commission de l'énergie atomique du Pakistan a fourni 40 000 kg de semences de coton Bt aux agriculteurs du Penjab.

Paraguay: Autorisé en 2005.

Philippines: Essais en champs.

Sénégal: Essais en champs irréguliers qui ont plus tard été abandonnés.

Thaïlande: Essais en champs en 1997. Abandonnés après des manifestations de masse.

Vietnam: Essais en champs.

Zimbabwe: Planté par Monsanto en 1998 sans autorisation officielle. La culture a été brûlée quand elle a été découverte par les autorités.

Des capsules à moitié vides

En 2000, avec le même battage que celui qui a lieu au Burkina Faso actuellement, Monsanto et sa filiale indienne Mahyco procédaient en Inde à leur première année d'essais en champs du coton Bt à l'échelle du pays tout entier. Les résultats des essais en champs, qui seront à la base de l'autorisation commerciale du coton Bt en Inde, ont montré une baisse importante dans l'usage des pesticides et une augmentation de la production en comparaison avec les variétés non Bt.[4]

L'Inde était assurément prête pour un tel produit. L'introduction des hybrides et des pesticides de la Révolution verte des années 60 et 70 avait entraîné les 17 millions de cultivateurs de coton du pays dans un cercle vicieux. Les rendements s'étaient accrus par moments mais la sensibilité des cultures de coton aux insectes et aux maladies aussi, ceux-ci ayantvévolué plus vite que les nouveaux produits que les scientifiques pouvaient produire à la chaîne pour les combattre. Face aux problèmes croissants de nuisibles les agriculteurs, qui étaient devenus complètement dépendants des conseils et des technologies des "experts" extérieurs, ont été encouragés à traiter plus souvent, avec des pesticides de plus en plus toxiques. Il était devenu courant pour les cultivateurs de coton de traiter leurs champs plus de 30 fois dans une seule saison. L'escalade dans le recours aux pesticides avait fait grimper les coûts de production qui, combinés avec la chute des prix pour le coton brut, avait entraîné des dettes très lourdes et le suicide de centaines si ce n'est de milliers de cultivateurs de coton indiens par an. [5] Les cultivateurs de coton indiens attendaient désespérément une nouvelle technologie, et si on se fiait aux résultats des essais en champs, le coton Bt de Monsanto semblait tomber à pic.

Le coton Bt était en fait déjà sur le marché indien depuis 1998, bien avant d'avoir été autorisé pour sa diffusion commerciale en mars 2002. Dans une histoire semblable à des scandales de contamination par les OGM dans d'autres pays, le gène Bt de Monsanto s'échappa pour une raison ou une autre d'essais en champs "confinés" de la compagnie, et cela se termina par la variété de coton appelée N-151 qui a été vendue dans l'Etat du Gujarat par la compagnie indienne de semences Naybharat. Monsanto préleva des échantillons de la culture du N-151 en 2001 après avoir appris que la variété avait résisté à une importante épidémie dans le Gujarat cette année-là. [6] Lorsque les tests ont montré la présence du gène Bt de Monsanto, la compagnie rendit immédiatement publique l'information et lança une accusation contre Naybharat. Il s'ensuivit une certaine confusion: le gouvernement indien menaça de détruire et de confisquer toute la récolte "illégale" du N-151, une tâche impossible étant donné que les semences s'étaient déjà répandues de cultivateurs en cultivateurs dans tout l'état et le pays; les cultivateurs de coton du Gujarat sont descendus dans les rues pour défendre leur droit de cultiver le coton miracle. Dans la mêlée, Navbaharat a été obligé d'arrêter la production de sa variété N-151, à cause de soit-disant risques biosanitaires, tandis que les trois variétés Bt de Monsanto étaient introduites en hâte grâce à un processus de réglementation extraordinairement inapte, et autorisées à la culture commerciale pour la saison suivante. [7]

Ce fut une belle opération de relations publiques pour Monsanto. La première année de la mise en vente en 2002, Mahyco-Monsanto a vendu la totalité de son stock de semences, et le coton Bt fut planté sur presque 45000 hectares. En 2005, grâce à une campagne publicitaire très offensive, le coton Bt hybride a été planté sur plus de 500 000 hectares. [8] Les partisans du coton Bt se sont évidemment emparés de ces chiffres pour vendre le succès du coton Bt en Inde, mais ce qui se déroulait réellement sur le terrain était très différent.

Au Gujarat, patrie de la variété N-151, les variétés Bt de Mahyco-Monsanto ont obtenu de piètres résultats la première année de leur culture. Un comité officiel de contrôle mis en place par le gouvernement de l'état a rapporté que des cultivateurs du Gujarat "avaient subi de lourdes pertes économiques avec la culture du coton Bt" lors de la saison 2002, ce que le comité a attribué à la sensibilité de la culture au flétrissement et aux insectes suceurs. Ces observations ont été répétées par les comités de contrôle mis en place cette année-là dans d'autres états produisant du coton, comme l'Andhra Pradesh, le Karnataka, le Madhya Pradesh et le Maharashtra. [9] Bien que certains aient rejeté ces difficultés initiales comme liées à un problème de qualité des variétés qui avaient été modifiées, et non à la technologie Bt elle-même, les complications liées au coton Bt n'ont pas disparu, même si de nouvelles variétés sont depuis entrées sur le marché.

Les scientifiques Abdul Qayum et Kiran Sakhari ont étudié les expériences des cultivateurs avec le coton Bt en Andhra Pradesh depuis que ces hybrides ont été introduits en 2002. Dans leur évaluation sur les trois premières années de culture du coton Bt dans l'état, ils ont trouvé que, en moyenne, les cultivateurs de coton non-Bt avaient gagné 60% de plus que les cultivateurs de coton Bt. Contrairement aux publicités de Monsanto et aux résultats de ses essais en champs, Qayum et Sakhari ont rapporté que les agriculteurs cultivant des hybrides Bt ne pouvaient pas diminuer l'utilisation de pesticides ni augmenter leurs rendements.

L'année suivante, en 2005-6, suite à l'interdiction des hybrides Bt de Monsanto-Mahyco, Qayum et Sakhari sont retournés dans les champs pour voir comment les agriculteurs s'en sortaient avec d'autres nouvelles variétés de coton hybride Bt. De nouveau, ils ont découvert que les coûts de maîtrise des insectes ravageurs étaient plus élevés pour les cultivateurs de Bt que pour ceux qui ne cultivaient pas de Bt, en grande partie à cause de l’augmentation des problèmes liés à des insectes secondaires. Cette fois-là, Qayum et Sakhari ont intégré à leur étude une comparaison avec les cultivateurs de coton utilisant des méthodes sans pesticides pour maîtriser les insectes. Ces cultivateurs ont obtenu les bénéfices nets les plus élevés de tous les agriculteurs enquêtés, plus élevés que les cultivateurs de coton non-Bt utilisant des pesticides chimiques et bien plus élevés que les agriculteurs cultivant du coton Bt.

Leur étude faisait écho à des rapports antérieurs qui avaient constaté que le coton Bt était sensible au flétrissement, et les chercheurs alertaient sur le fait que la généralisation de sa culture ouvrait la voie à une épidémie. [10] La maladie du flétrissement était effectivement devenue un problème catastrophique, et pas seulement en Andhra Pradesh. En octobre 2005, une commission d'enquête de 11 personnes composée d'agriculteurs, de militants sociaux et d'ingénieurs agronomes est allée dans trois villages du district de Badwani dans l'état voisin du Madhya Pradesh pour enquêter sur la maladie du flétrissement constatée de nombreuses fois dans des champs de coton Bt. L'équipe constata que les dégâts causés par le flétrissement étaient effectivement omniprésents et étaient beaucoup plus graves dans les divers cotons Bt hybrides que dans les variétés conventionnelles. L'équipe évalua toutes les variables possibles et conclut que "la maladie du flétrissement est un phénomène qui affecte le coton Bt" et excluait la possibilité que le flétrissement soit "le résultat d'un stress abiotique ou dû à un défaut dans les pratiques de culture du coton Bt par les agriculteurs". Selon l'équipe, les problèmes de flétrissement semblaient être "le reflet des résultats imprévisibles provenant de la technologie de la transgenèse utilisée pour le coton Bt et la vulnérabilité accrue des plantes transgéniques aux nouveaux nuisibles et maladies".

L'histoire des quatre premières années de la culture du coton Bt en Inde a été parfaitement résumée par P.V. Satheesh, responsable de la Coalition de l'Andhra Pradesh pour la défense de la diversité (Andhra Pradesh Coalition in Defence of Diversity):

"La première année (2002), le coton Bt fut un désastre, produisant 35% de moins que le coton non Bt, alors qu'il coûtait 4 fois plus. La troisième année, de nouvelles maladies se sont propagées dans le sol et la plante. Le bétail qui broutait le coton Bt a commencé à mourir. Et cette année (2006), les plants de Bt ont commencé à flétrir, obligeant les cultivateurs à les déraciner à contre-cœur. Dans le village de Mustyalapally, dans le Bhongir mandal de Nalgonda, les agriculteurs ont arraché le coton Bt de 41 des 51 acres plantés. La maladie s'est propagée aux villages voisins, répandant la panique parmi les cultivateurs. Les agriculteurs se sont plaints que les plantes mourraient lentement les unes après les autres parce que le système racinaire était gravement décomposé, sans qu'il y ait de système racinaire secondaire ou tertiaire sur le système principal. Même les capsules qui s'étaient formées sur ces plants flétris ne portaient aucunes graines." [11]

Des agriculteurs ont réagi avec colère par des manifestations de rue violentes et en incendiant des points de vente de semences. Il y a eu le cas d'agriculteurs qui demandaient des dédommagements et qui ont pris un représentant de Mazhyco-Monsanto en otage. De nombreux autres cependant, ont quitté leurs fermes ou ont mis fin à leur vie. Dans la ceinture du coton de Vidarbha, où le coton Bt est largement répandu, le taux de suicide parmi les cultivateurs de coton atteint des sommets terribles, avec plus de 100 suicides de cultivateurs de coton par mois en 2006. [12]

On peut s'attendre à des problèmes bien plus graves à l'avenir. On rapporte que le ver de la capsule du coton (bollworm), le principal insecte ciblé par le coton Bt, commence déjà à développer une résistance. "Des foyers (d'infestation) près de Vadodara (Gujarat) sont alarmants", a déclaré le Dr K. R. Kranthi de l'Institut central de recherche sur le coton de Nagpur. "Et pour le reste du pays, ce n'est qu'une question de temps." [13] Plus de 55% de tous les pesticides utilisés en Inde sont aujourd’hui employés pour la production du coton, même si cette culture n'occupe que 5% de la surface agricole du pays.

L’engrenage du coton

“Avec le développement du coton GM, nous pouvons réduire l'utilisation des pesticides de plus de 80% … et les cas d'empoisonnements par pesticides de 90%." Professeur Guo Sandui, de l'Académie des Sciences chinoise et inventeur du coton GM chinois. [14]

Indonésie

L'Inde n'est pas le premier pays à rencontrer des problèmes avec le coton Bt. En Indonésie, lors de la première mise en culture en 2001, les plants de coton Bollgard de Monsanto ont été ravagés par les insectes, alors que les autres cultures de coton n'ont subi que des dommages insignifiants. Les cultivateurs de coton indonésiens en colère, qui avaient payé très cher ces semences Bt, ont incendié leurs champs en signe de protestation et obligé Monsanto à retirer le coton Bt du pays après seulement deux saisons sur le marché. [15]

Chine & US

En Chine et aux Etats-Unis, deux pays qui ont une longue expérience de la culture du coton, le coton Bt a d'abord fait baisser l'utilisation des pesticides. Mais peu après, des insectes qui étaient au départ d'importance mineure, ont commencé à causer de graves dégâts dans les cultures, et les agriculteurs sont vite revenus à leur ancien taux d'utilisation de pesticides.

Dans une étude récente sur 481 cultivateurs de coton dans cinq provinces de Chine, des chercheurs de l'université de Cornell ont montré que les gains que les cultivateurs de coton chinois avaient obtenus avec le coton Bt pendant la saison 2000-2001 avaient complètement disparu trois ans plus tard. Voici ce qui s'était passé: dans les premières années, quand le coton Bt maîtrisait le ver de la capsule, l'insecte ravageur le plus important dans la région, les agriculteurs ont réduit l'usage des pesticides à large spectre, réduisant ainsi leurs coûts et augmentant leurs revenus. Mais le coton Bt n'apportant aucun contrôle sur les insectes secondaires, ces derniers ont vite pris la place des vers du coton. Selon les chercheurs de Cornell, "une majorité des cultivateurs de coton Bt ont indiqué qu'ils devaient traiter 15 à 20 fois plus qu'avant pour tuer les insectes secondaires, les mirides, qui ne nécessitaient pas de pesticides les années précédant l'adoption du Bt." En fait, en 2004, les cultivateurs de coton Bt dépensaient autant pour les pesticides que les cultivateurs de coton non Bt… et au moins 2 à 3 fois plus pour les semences. [16]

Des faits similaires sont rapportés des Etats-Unis, où les dégâts causés par les insectes secondaires, comme les punaises puantes et les punaises des plantes, ont considérablement augmenté depuis l'introduction du coton Bt, connu sous le nom de Bollgard. [17] Comme en Chine, les coûts des pesticides pour contrôler ces insectes secondaires peuvent dépasser ce que les cultivateurs de coton américains avaient l'habitude de dépenser en pesticides pour les variétés conventionnelles, en particulier si on tient compte des coûts élevés des semences Bt. " Les insectes secondaires, les punaises des plantes et les punaises puantes, mangent notre pain", dit Bruce Bond, un cultivateur de coton de l'Arkensas. "Je dépense probablement 90 $ par acre en insecticides pour le coton Bt. J'estime que c'est trop, en particulier quand je paie 32$ d’avance. L'année prochaine, j'aimerais augmenter un peu la surface de coton non Bt. J'ai planté mon coton-refuge (coton non Bt) dans le pire sol que j'ai, et un champs de 23 acres de cette plantation a donné le meilleur coton que j'ai récolté cette année." [18]

Un inconvénient financier supplémentaire que les cultivateurs de coton des Etats- Unis rencontrent avec le coton Bt est qu'ils ne peuvent pas varier le taux de toxine selon le degré de pression de l'insecte. Ils doivent payer la totalité du prix pour les semences Bt que le ver de la capsule soit ou non une menace sérieuse dans leurs champs. Dans certains endroits de l'Arkansas, par exemple, les agriculteurs protestent contre une mesure fédérale les obligeant à cultiver du coton Bt comme partie intégrante d'un programme d'éradication du charançon de la capsule à l'échelle de l'état. Ils disent que le degré de pression du charançon de la capsule sur leurs fermes est trop faible pour justifier les coûts des semences Bt. [19] De plus, l'expérience des Etats-Unis montre que, quand la pression du ver de la capsule est élevée, le coton Bt ne conserve pas toujours sa résistance et les agriculteurs finissent quand même par utiliser des pesticides. "Il y a maintenant des foyers dans le Sud-Est comprenant plus de 100 000 acres (40 000 hectares) en Georgie, où le ver de la capsule ne peut pas être maîtrisé en sur-traitant le coton Bt," déclare l'entomologiste Smith. "Si beaucoup en réchappent, ils peuvent causer beaucoup de dégâts. Ils ont eu plus de 15% de dégâts dans les capsules du coton Bollgard en Georgie, à cause d‘une sur infestation. Trois traitements de pyrèthre en cinq jours n'en sont pas venus à bout." [20] Pour résoudre ces problèmes croissants d'insectes, Monsanto et Syngenta ont introduit de nouvelles variétés de coton Bt aux Etats-Unis et ailleurs qui sont censées présenter une plus grande résistance aux insectes, à un prix plus élevé, bien entendu. En Inde, où le Bollgard de Monsanto se vend aujourd'hui à 17 US$ le paquet de semences de 450 g, les semences de la nouvelle variété Bollgard II de la compagnie vont se vendre à 30 US$ le paquet de 450 g en 2006-2007. [21] Et l’engrenage continue.

La construction d'un empire

L'entreprise Monsanto des Etats-Unis domine le marché mondial de la semence de coton. Au moins deux tiers du coton Bt vendu dans le monde est vendu sous licence Monsanto ou vendu directement par Monsanto et ses filiales. [1] L'acquisition récente par Monsanto de Emergent Genetics (qui dirige la troisième plus grosse entreprise semencière aux Etats-Unis et en Inde) et Delta and Pine Land (l'ex plus grosse entreprise de semences de coton du monde et le propriétaire/inventeur de la célèbre technologie Terminator) fera de Monsanto, si le rachat de Delta and Pine Land est approuvé par le Ministère de la justice des Etats-Unis, la plus grosse compagnie de semences de coton du monde. De plus, en prenant le contrôle de Delta and Pine Land, Monsanto acquiert aussi les droits sur la collection mondiale de ressources génétiques du coton de son concurrent le plus important, Syngenta. En plus de Syngenta et DowAgrosciences, les deux autres multinationales qui ont récemment commercialisé des plantes cultivées Bt, la principale concurrence pour Monsanto vient d'une entreprise chinoise appelée Biocentury qui s'est créée avec le puissant soutien de l'Etat chinois et qui a des accords avec des entreprises en Inde et au Vietnam pour le développement du coton Bt. [2] Mais récemment, 34% des parts de Biocentury ont été achetées par Origin Agritech, une entreprise basée dans les Iles Vierges britanniques qui est en train de rapidement renforcer ses positions sur le marché des semences chinois. [3]

[1] - ETC Group, “Oligopoly, Inc 2005,” 16 Décembre 2005: http://tinyurl.com/yk3smq
[2] - James Keeley, “The biotech developmental state? Investigating the Chinese gene revolution”, IDS Working Paper 207, September 2003: http://tinyurl.com/ybnmbx
[3] – Pour plus d'informations sur Origin Agritech, consultez le blog de GRAIN sur le riz hybride à la date du 23 Janvier 2006: http://www.grain.org/research/?lid=160

Pas de solution miracle

Pour Monsanto et les autres entreprises de pesticides, les cultures Bt sont essentiellement un moyen ingénieux d'étendre leurs profits face à la compétition croissante des producteurs génériques d'insecticides sans brevets. Au lieu de vendre un pesticide chimique que les agriculteurs pulvérisent, Monsanto vend le pesticide via la semence. Et cela présente un autre avantage pour les entreprises: les agriculteurs cultivant des plantes Bt comptent toujours sur les pesticides, et, si les coûts des redevances de la technologie Bt sont facturées avec la semence, ils finissent généralement par dépenser plus pour maîtriser les insectes, ce qui est bon pour les résultats financiers du fabricant de pesticides.

En Inde, où les cultivateurs de coton se sont suicidés ou ont quitté leurs fermes en nombre record pour échapper à la ruine, Monsanto a réalisé plus de 17 millions de dollars de royalties les trois premières années de vente du coton Bt. La situation des agriculteurs était si mauvaise qu'en avril 2006, la Commission des monopoles et des atteintes à la libre concurrence de l'Inde est intervenue pour exiger que Monsanto fasse payer un "prix raisonnable" les semences de coton Bt. Monsanto répondit en abaissant la redevance pour la technologie à 20 roupies, ce qui était insignifiant, et n'avait pas beaucoup d'impact sur les prix des semences de coton Bt, qui ont continué à être vendues par l'entreprise et ses filiales entre 1200 et 1300 roupies le paquet de 450 g. Les gouvernements des états d'Andhra Pradesh, du Tamil Nadu, et du Karnataka ont ensuite intenté une action en justice à la Cour suprême pour demander que le prix des semences de coton Bt soit réduit au moins à 750 roupies le paquet de 450 g. [22] Sous la pression de ces gouvernements et avec les hybrides de coton Bt utilisant la technologie Bt de l'entreprise chinoise Biocentury entrant sur le marché à un prix bien moins cher, Monsanto et ses concessionnaires ont radicalement réduit le prix de leurs semences de coton Bt de plus de 70% à la saison 2006-2007 et se sont lancés à fond dans une guerre de marketing sans merci. Le coton Bt déferla sur l'Inde. Même dans le district de Warangal en Andhra Pradesh, où l'échec du coton Bt dans les premières années a été si bien documenté, la zone plantée en hybrides Bt dépassa 80% de la surface totale de culture du coton. Bien sûr, les mêmes problèmes persistaient, le flétrissement, les insectes secondaires, la résistance du ver de la capsule, les dettes des cultivateurs, mais cette fois-ci à une plus grande échelle. Rien de tout cela n'a beaucoup inquiété Monsanto. L'entreprise avait un marché prêt à accueillir sa prochaine création technologique: son coton Bollgard II, qui sera vendu deux fois le prix.

Dette et dépendance

L'expérience du coton Bt a été particulièrement pénible pour les petits agriculteurs. Avec un prix du coton brut au plus bas, la situation générale des petits cultivateurs de coton dans le sud, c'est la dette et la dépendance. Ils sont donc extrêmement vulnérables aux promesses des technologies étrangères de résoudre les problèmes fondamentaux qu'ils affrontent, qui sont en grande partie politiques. En Afrique du Sud par exemple, le coton Bt a été adopté par les petits agriculteurs des Makhathini Flats du KwaZulu natal, l'une des régions les plus pauvres du pays et le dernier refuge pour la production de coton à petite échelle. Une étude récente sur l'adoption du coton Bt dans la région, basé sur des entretiens approfondis avec les agriculteurs locaux, a écarté les facteurs agronomiques comme l'augmentation de la production ou la réduction de l'utilisation des pesticides comme des facteurs pouvant expliquer l'adoption du coton Bt. Les chercheurs ont trouvé que la plupart des agriculteurs de la région avaient commencé à cultiver le coton Bt en 1998 à cause de l'absence d'alternatives:

"Dans un contexte dans lequel de nombreux agriculteurs se sentaient abandonnés par le département provincial de l'agriculture et par les services techniques du gouvernement et les organismes de crédit, ce n'est qu'à travers le coton que les agriculteurs pouvaient avoir accès aux semences, au crédit et au soutien. Par-dessus tout ça, et de manière répétée dans toutes nos discussions, les agriculteurs des zones arides de la région du Makhathini exprimaient clairement qu'ils avaient peu d'alternatives au coton. L'absence d'alternatives au niveau des cultures se reproduit au niveau de l'achat des semences ou de l'approvisionnement en semences. Les choix sont déjà limités du fait que Cotton South Africa (l'organisation des cultivateurs de coton) proposait une liste restreinte de trois variétés de semences recommandées pour garantir la consistance dans la transformation des fibres.
" Les agriculteurs disent, et cela est confirmé par les employés de l'entreprise du coton de Mahkhathini (MCC), que le coton conventionnel amélioré n'est cultivé nulle part dans les Mahkhathini Flats. Alors que le Delta Opel, une variété améliorée non GM, est en vente dans le point de vente officiel Wenkem situé à côté de l'égreneuse du MCC, elle n'est vendue qu'en quantité de 25 kg, au contraire de la semence de la variété Bollgard TM NuCOTN 37-B qui est commercialisée dans un package 'Ecombi' de 5 kg, une taille idéale pour les petites surfaces qui prédominent dans les Flats. Et ce qui est encore plus prohibitif, l'égreneuse du MCC n'achète que le coton emballé dans les sacs en laine fournis par le MCC. Ces sacs en laine sont distribués aux agriculteurs au début de la saison en fonction de l'information provenant de listes fournies au MCC par Wenkem sur ceux qui ont la licence pour cultiver le coton Bt. Ainsi, le MCC exclut les cultivateurs potentiels de coton non-Bt uniquement en permettant au coton Bt de passer par son égreneuse." [23]

L'introduction du coton Bt dans la région a immédiatement aggravé les problèmes d'endettement des cultivateurs locaux. Les agriculteurs ont acheté les semences à crédit, et en l'espace d'un an, les revenus tirés du Bt étant insuffisants pour que les cultivateurs puissent suivre leur échéancier de remboursements, la banque locale Land Bank a du saisir les biens hypothéqués pour 1447 des 1648 prêts qu'elle avait accordés. La Land Bank a cessé d'accorder des prêts dans le Makhathini en 2004, avec plus de 3 millions de dollars impayés des prêts non remboursés. "Il faut bien comprendre le coton GM comme le dernier maillon d'une longue série d'interventions technocratiques qui ont constamment échoué à transformer le Makhathini en foyer de production de matières premières, mais ont au contraire été guidées par une volonté technocratique de faire du coton une culture de rente lucrative, sans considération pour les conditions locales, les besoins ou l'écologie," conclut le rapport. [24] Le Makhathini fut autrefois la vitrine de l'industrie biotech destinée à montrer comment les manipulations génétiques pouvaient aider les petits agriculteurs.

Afrique de l’Ouest

Si le coton Bt échoue à améliorer les vies des petits cultivateurs dans le Makhathini, il est encore moins probable qu'il pourra aider les cultivateurs d'Afrique de l'Ouest, où l'industrie concentre actuellement toute son attention. Les cultivateurs d'Afrique de l'Ouest ont une longue histoire avec la production de coton et l'un des taux de pesticides utilisés pour le coton les plus bas du monde. Leurs problèmes ne sont pas liés aux variétés qu'ils utilisent. [25] Le problème principal, comme les organisations paysannes de la région ne cessent de le répéter, est la structure du marché mondial et les surplus de production subventionnés aux Etats-Unis et en Europe. La dernière chose dont les agriculteurs d'Afrique de l'Ouest ont besoin, c'est d'un nouveau cycle de dépendance qui arriverait s'ils adoptaient les semences chères des puissantes entreprises étrangères. Le coton Bt en Afrique de l'Ouest, comme dans le reste du monde, ne profitera pas aux petits agriculteurs. C'est simplement un moyen par lequel les entreprises peuvent tirer plus de profits à court terme et détourner les gens de poursuivre des méthodes plus prometteuses pour réduire l'utilisation des pesticides. En réalité, seul un changement structurel profond pourrait transformer la culture du coton en culture durable pour les millions de petits paysans qui le produisent chaque année.

[1] V La CV-OGM/BF, “Vulgarisation du coton biologique, le Burkina respecte-t-il le principe de précaution?” Sidwaya (Ouagadougou), 23 November 2006: http://tinyurl.com/t8axl
[2] Communication personnelle de Souleymane Nacro, Directeur du programme GIPD au Burkina Faso, 30 Novembre 2006.
[3] Communication personnelle de Souleymane Coulibaly, Directeur du programme GIPD au Mali, 18 décembre 2006.
[4] R. Ramachandran, “Green signal for Bt-cotton,” (Feu vert pour le coton Bt) Frontline, 18:8, 13–26 April 2002: http://tinyurl.com/w379h
[5] Esha Shah, “Local and Global Elites Join Hands: Development and Diffusion of Bt Cotton Technology in Gujarat,” (Les élites locales et mondiales s'unissent pour le développement et la diffusion de la technologie du coton Bt au Gujarat), Economic and Political Weekly, 22 Octobre 2005: http://tinyurl.com/yxreec
[6] Douglas McGray, “An agricultural mystery in India has set off concerns over a growing underground trade in genetically engineered seeds,” (Un mystère agricole en Inde a déclenché des inquiétudes sur un trafic croissant de semences génétiquement modifiées), IRP, Printemps 2002: http://tinyurl.com/y48gjk
[7] T.V. Padma, “Indian GM research ‘lacks focus and transparency’,” (La recherché indienne sur les plantes GM manque de cohérence et de transparence) SciDev.Net, 22 Juin 2005: http://tinyurl.com/y6ozmt
[8] Greenpeace Inde et le Centre pour une agriculture durable (Centre for Sustainable Agriculture), “Marketing of Bt Cotton in India – Aggressive, Unscrupulous and False” (Le marketing du coton Bt en Inde, agressif, sans scrupules et mensonger), Septembre 2005: http://tinyurl.com/yxsbhb; et Ashok Sharma, “It’s a blind run for Bt cotton hybrids,” (La course aveugle vers les hybrides de coton Bt) Financial Express, 5 Juin 2006: http://tinyurl.com/yxa3nv
[9] Rapports sur les résultats du coton Bt: http://tinyurl.com/y7anj8
[10] Deux études de Abdul Qayum et Kiran Sakkhari, “Did Bt cotton fail AP again in 2003–2004? A season-long study of Bt Cotton in Andhra Pradesh” (AP Coalition In Defence of Diversity, 2003); “False hopes, festering failures: Bt cotton in Andhra Pradesh 2005–2006” (AP Coalition In Defence of Diversity, 2006) disponibles sur le site: http://www.grain.org/research/btcotton.cfm?links
[11] Communiqué de presse de la Coalition d'Andhra Pradesh pour la défense de la diversité (AP Coalition In Defence of Diversity), 8 Septembre 2006: http://tinyurl.com/ymtwb5
[|2] “A hundred farm suicides a month in Vidarbha” (Une centaine de suicides par mois à Vidarbha), RxPG News Service, 29 Novembre 2006: http://tinyurl.com/ynywrg
[13] Kalyan Ray, “Bt cotton bubble set to burst,” (La bulle du coton B t commence à exploser) Deccan Herald, 14 Novembre 2006: http://tinyurl.com/ylejmn
[14] “Bt cotton bubble set to burst” (La bulle du coton Bt commence à exploser), Deccan Herald, 14 Novembre 2006: http://tinyurl.com/yamxu5
[15] Tan Cheng Li, “Farmer’s bane,” (Le fléau qui empoisonne les agriculteurs), The Star, Malaysia, 2 Mars 2004: http://tinyurl.com/w4o3l; et Pennapa Hongthong, “GMO Crops: A Cautionary Tale,” Les cultures GM, un récit édifiant), The Nation (Jakarta), 27 Septembre 2004: http://tinyurl.com/yg85pd
[16] Shenghui Wang, David R. Just, et Per Pinstrup-Andersen, “Tarnishing Silver Bullets: Bt Technology Adoption, Bounded Rationality and the Outbreak of Secondary Pest Infestations in China,” Selected Paper prepared for presentation at the American Agricultural Economics Association Annual Meeting Long Beach, CA, (L'adoption de la technologie Bt, une rationalité limitée, et le déclenchement d'infestations par des insectes secondaires en Chine", choix d'articles préparés pour être présentés à la réunion annuelle de l'Association américaine des économies agricoles) 22–26 July 2006.
[17] Paul L. Hollis, “Stink bugs continue to dominate in Southeast cotton,” (Les punaises continuent de dominer le coton du Sud-Est), Southeast Farm Press, 13 Mars 2006.
[18] Bruce Bond: High Cotton Winner (Bruce Bond, le grand gagnant du coton) (Elton Robinson, Delta Farm Press, Janvier 2005): http://tinyurl.com/y9a97g
[19] Pat Ivey, “Farmers lash out at ‘half truths’”, (Les agriculteurs s'en prennent violemment aux demi vérités) Blytheville Courier News, 30 Juillet 2004: http://tinyurl.com/y3nlx4
[20] Paul L. Hollis, “Stink bugs continue to dominate in Southeast cotton,” (Les punaises continuent de dominer le coton du Sud-Est), Southeast Farm Press, 13 Mars 2006.
[21] K.V. Kurmanath, “AP puts on hold nod for sale of Bollgard-II,” (L'Andhra Pradesh suspend l'autorisation de la vente du Bollgard II) The Hindu, 8 Novembre 2006: http://tinyurl.com/yzwemd
[22] “Andhra Pradesh files case against Bt cotton in MRTPC,” (L'Andhra Pradesh intente un procès contre le coton Bt au MRTPC) WebIndia 123, 2 Janvier 2006: grain.org/bio-ipr/?id=462
[23] Harald Witt, Rajeev Patel et Matthew Schnurr, “Can the Poor Help GM Crops? Technology, Representation and Cotton in the Makhathini Flats, South Africa,”(Les pauvres peuvent-ils aider les cultures GM? Technologie, représentation et coton dans les Makhathini Flats), Review of African Political Economy (109), 2006, pp. 497–513.
[24] Ibid.
[25] GRAIN, “GM cotton set to invade West Africa: Time to act!” (Le coton Bt prêt à envahir l'Afrique de l'Ouest: il est temps d'agir!)Juin 2004. grain.org/briefings/?id=184
Source de l’article: http://www.grain.org/seedling/?id=475

Bt COTTON & THE GENOCIDE OF INDIAN COTTON FARMERS



From Seeds of Suicide to Seeds of Hope: Why Are Indian Farmers Committing Suicide and How Can We Stop This Tragedy?

By Vandana Shiva

source: http://www.huffingtonpost.com/vandana-shiva/from-seeds-of-suicide-to_b_192419.html

In a land where reincarnation is a commonly held belief, where the balance sheet of life is sorted out over lifetimes, where resilience and recovery has been the characteristic of the "kisan," the peasant cultivation, why are Indian farmers committing suicide on a mass scale?

200,000 farmers have ended their lives since 1997.Farmers' suicides are the most tragic and dramatic symptom of the crisis of survival faced by Indian peasants. Rapid increase in indebtedness is at the root of farmers' taking their lives. Debt is a reflection of a negative economy. Two factors have transformed agriculture from a positive economy into a negative economy for peasants: the rising of costs of production and the falling prices of farm commodities. Both these factors are rooted in the policies of trade liberalization and corporate globalization.

In 1998, the World Bank's structural adjustment policies forced India to open up its seed sector to global corporations like Cargill, Monsanto and Syngenta. The global corporations changed the input economy overnight. Farm saved seeds were replaced by corporate seeds, which need fertilizers and pesticides and cannot be saved.
Corporations prevent seed savings through patents and by engineering seeds with non-renewable traits. As a result, poor peasants have to buy new seeds for every planting season and what was traditionally a free resource, available by putting aside a small portion of the crop, becomes a commodity. This new expense increases poverty and leads to indebtness.

The shift from saved seed to corporate monopoly of the seed supply also represents a shift from biodiversity to monoculture in agriculture. The district of Warangal in Andhra Pradesh used to grow diverse legumes, millets, and oilseeds. Now the imposition of cotton monocultures has led to the loss of the wealth of farmer's breeding and nature's evolution.

Monocultures and uniformity increase the risk of crop failure, as diverse seeds adapted to diverse to eco-systems are replaced by the rushed introduction of uniform and often untested seeds into the market. When Monsanto first introduced Bt Cotton in 2002, the farmers lost 1 billion rupees due to crop failure. Instead of 1,500 kilos per acre as promised by the company, the harvest was as low as 200 kilos per acre. Instead of incomes of 10,000 rupees an acre, farmers ran into losses of 6,400 rupees an acre. In the state of Bihar, when farm-saved corn seed was displaced by Monsanto's hybrid corn, the entire crop failed, creating 4 billion rupees in losses and increased poverty for desperately poor farmers. Poor peasants of the South cannot survive seed monopolies. The crisis of suicides shows how the survival of small farmers is incompatible with the seed monopolies of global corporations.

The second pressure Indian farmers are facing is the dramatic fall in prices of farm produce as a result of the WTO's free trade policies. The WTO rules for trade in agriculture are, in essence, rules for dumping. They have allowed wealthy countries to increase agribusiness subsidies while preventing other countries from protecting their farmers from artificially cheap imported produce. Four hundred billion dollars in subsidies combined with the forced removal of import restriction is a ready-made recipe for farmer suicide. Global wheat prices have dropped from $216 a ton in 1995 to $133 a ton in 2001; cotton prices from $98.2 a ton in 1995 to $49.1 a ton in 2001; Soya bean prices from $273 a ton in 1995 to $178 a ton. This reduction is due not to a change in productivity, but to an increase in subsidies and an increase in market monopolies controlled by a handful of agribusiness corporations.

The region in India with the highest level of farmers suicides is the Vidharbha region in Maharashtra -- 4000 suicides per year, 10 per day. This is also the region with the highest acreage of Monsanto's GMO Bt cotton. Monsanto's GM seeds create a suicide economy by transforming seed from a renewable resource to a non-renewable input which must be bought every year at high prices. Cotton seed used to cost Rs 7/kg. Bt-cotton seeds were sold at Rs 17,000/kg. Indigenous cotton varieties can be intercropped with food crops. Bt-cotton can only be grown as a monoculture.

Indigenous cotton is rain fed. Bt-cotton needs irrigation. Indigenous varieties are pest resistant. Bt-cotton, even though promoted as resistant to the boll worm, has created new pests, and to control these new pests, farmers are using 13 times more pesticides then they were using prior to introduction of Bt-cotton. And finally, Monsanto sells its GMO seeds on fraudulent claims of yields of 1500/kg/year when farmers harvest 300-400 kg/year on an average. High costs and unreliable output make for a debt trap, and a suicide economy.

While Monsanto pushes the costs of cultivation up, agribusiness subsidies drive down the price farmers get for their produce. Cotton producers in the US are given a subsidy of $4 billion annually. This has artificially brought down cotton prices, allowing the US to capture world markets previously accessible to poor African countries such as Burkina Faso, Benin, and Mali. This subsidy of $230 per acre in the US is untenable for the African farmers. African cotton farmers are losing $250 million every year. That is why small African countries walked out of the Cancun negotiations, leading to the collapse of the WTO ministerial.

The rigged prices of globally traded agriculture commodities steal from poor peasants of the South. A study carried out by the Research Foundation for Science, Technology and Ecology (RFSTE) shows that due to falling farm prices, Indian peasants are losing $26 billion annually. This is a burden their poverty does not allow them t bear. As debts increase -- unpayable from farm proceeds -- farmers are compelled to sell a kidney or even commit suicide. Seed saving gives farmers life.
Seed monopolies rob farmers of life.

Farmers suicides in the state of Chattisgarh have recently been before in the news. 1593 farmers committed suicide in Chattisgarh in 2007. Before 2000 no farmers suicides are reported in the state. Chattisgarh is the Centre of Diversity of the indice varieties of rice. More than 200,000 rices used to grow in India. This is where eminent rice scientists Dr. Richaria did his collections and showed that tribals had bred many rices with higher yields than the green Revolution varieties.
Today the rice farming of Chattisgarh is under assault. When indigenous rice is replaced with green Revolution varieties, irrigation becomes necessary. Under globalization pressures, rice is anyway a lower priority than exotic vegetables. The farmers are sold hybrid seeds, the seeds need heavy inputs of fertilizers and pesticides, as well as intensive irrigation. And crop failure is frequent. This pushes farmers into debt and suicide.

Chattisgarh is also a prime target for growing of Jatropha for biofuel. Tribals farms are being forcefully appropriated for Jatropha plantations, aggravating the food and livelihood crisis in Chattisgarh. The diesel demand of the automobile industry is given a priority above the food needs of the poor.

The suicide economy of industrialized, globalised agriculture is suicidal at 3 levels - it is suicidal for farmers, it is suicidal for the poor who are derived food, and it is suicidal at the level of the human species as we destroy the natural capital of seed, biodiversity, soil and water on which our biological survival depends.

The suicide economy is not an inevitability. Navdanya has started a Seeds of Hope campaign to stop farmers suicides. The transition from seeds of suicide to seeds of hope includes :

• a shift from GMO and non renewable seeds to organic, open pollinated seed varieties which farmers can save and share.
• a shift from chemical farming to organic farming.
• a shift from unfair trade based on false prices to fair trade based on real and just prices.

The farmers who have made this shift are earning 10 times more than the farmers growing Monsanto's Bt-cotton.