Wednesday, April 15, 2009

OPPOSITION AU COTON Bt DE MONSANTO AU BURKINA FASO

Depuis ces dix dernières années, l’Afrique subit une pression de plus en plus fortede la part des pays du Nord, des Institutions Internationales (BM, FMI, OMC), et des multinationales de la biotechnologie afin d’introduire les Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) dans les pratiques agricoles du continent sous couvert de modernisation des modes de production.

En Afrique de l’Ouest, en particulier, de nombreuses initiatives sont en cours (CORAF/WECARD, initiative du CILSS en Biosécurité, Plan d’Action pour la Promotion de la Biotechnologie et la Biosécurité dans l’espace CEDEAO, le projet régional Ouest africain -Bénin, Burkina Faso, Mali, Sénégal, Togo- de biosécurité), toutes ces projets ont pour objectif la promotion des OGM ou la création de cadres réglementaires propices à la vulgarisation des cultures transgéniques. Presque toutes ces initiatives sont financées par les mêmes partenaires : l’USAID, les multinationales de semence (Monsanto et Syngenta), CROPLIFE, avec le soutient de la Banque Mondiale.

Le Burkina Faso, qui a ratifié la Convention sur la diversité biologique, le protocole de Carthagène et qui a adopté les lois cadres de l’Union Africaine sur la biosécurité et les droits des communautés en juillet 2001, n’a pas résisté à cette agression. Bien plus, il a été le premier pays en Afrique de l’Ouest à s’engager depuis 2003 dans l’aventure de la transgénèse par l’introduction des essais de culture de coton Bt. Lors de la Journée Nationale du Paysan, il a été annoncé que la culture du coton Bt au Burkina se fera sur une surface officielle de 15 000 ha au cours de la campagne 2008, ce qui démontre le passage à une culture massive et non plus des essais.

Rappel des faits sur l’introduction du coton Bt au Burkina Faso :

- En juillet 2003, le BURKINA FASO devient le premier pays d’Afrique de l’Ouest à expérimenter le coton transgénique, sans avoir définit au préalable un cadre réglementaire conséquent pour protéger les populations et l’environnement des risques liés aux organismes génétiquement modifiés.

- Cette phase expérimentale s’est faite de façon opaque sans actions conséquentes pour informer/sensibiliser les populations sur le sujet.

- En juin 2004, un début de régularisation avec la mise en place d’un cadre législatif par l’adoption de règles nationales en matière de sécurité en biotechnologie a été amorcé et pas encore finalisé.

- En mars 2006, une loi portant sur le régime de sécurité en matière de biotechnologie, a été votée et des décrets d’application de cette loi sont toujours dans le circuit pour être examinés.

- A ce jour, seulement l’Agence Nationale de Biosécurité (ANB) et le Comité Scientifique National de Biosécurité ont été mis en place. Il reste encore à mettre en place un Observatoire National de Bio-surveillance, et des Comités Scientifiques internes de Biosécurité, comme le prescrit notre loi en son article 53.

- En septembre 2006, le Ministre d’Etat, Ministre de l’Agriculture, de l’Hydraulique et des Ressources Halieutiques décide de l´introduction et de la production du Coton Bt en champ pour la campagne 2007. Lors de la journée nationale des paysans en début d’année 2008, il déclare que le Burkina produira 15000 ha de coton Bt au cours de la campagne 2008/2009.

Si les autorités politiques se sont clairement prononcées en faveur de l’introduction et de l’utilisation des OGM dans l’agriculture burkinabaise, le débat reste âpre entre les chercheurs, le gouvernement et la société civile. Dans l’euphorie, certains leaders paysans et grands producteurs se sont déclarés favorables á l´introduction du coton Bt au Burkina Faso sans en mesurer les enjeux réels á tous les niveaux.

De façon générale et par rapport aux producteurs des pays de l’Afrique de l’Ouest, le public burkinabais et surtout les producteurs n’ont pas encore un accès suffisant à une formation/information objective sur la problématique de l´introduction des cultures transgéniques au Burkina Faso.

C’est dans ce contexte que la COPAGEN/Burkina s’est montrée soucieuse d’apporter une information juste et objective sur la problématique de la vulgarisation des cultures transgéniques et du brevetage du vivant au Burkina. C’est pourquoi la COPAGEN a organisé du 16 au 23 Février 2008, une caravane d’information, de sensibilisation et de partage d’expériences entre paysans de l’espace UEMOA et de la guinée Conakry. En effet, initialement prévue pour se tenir dans la zone Ouest du Burkina avec la participation des paysans de Sikasso (Mali), la caravane a connu la participation active des paysans de l’espace UEMOA et de la Guinée Conakry (zone d’implantation de la COPAGEN régionale) ce qui a permis la mise en place d’une seconde caravane parcourant l’Est du Burkina.

Déroulement et activités de la caravane

Deux caravanes sont parties simultanément de Fada à l’Est du Burkina Faso (province du Gourma où sont arrivés nigériens, togolais et béninois) et Bobo à l’Ouest du pays (province du Houet où sont arrivés Sénégalais, ivoiriens, guinéens et maliens) pour s’achever à Houndé dans la Province du Tuy. Elle a traversée les localités de :

- A l’Ouest : Bobo et Dandé (province du Houet), Koumbia (province du Tuy)

- A l’Est et au centre : Fada (province du Gourma), Mogtédo (province du Ganzourgou), Ouagadougou capitale du Burkina Faso et chef lieu de la province du Kadiogo.

A chaque étape, diverses activités ont été mises en place lors du passage de la caravane, comme par exemple :

- L’organisation de foire aux savoirs locaux (notamment en matière de valorisation de semences traditionnelles, de produits bio) à toute les étapes sauf celle de Ouaga.

- La sensibilisation des populations par des émissions télévisées, radiodiffusées, théâtres forum, animation culturelle (sketch, contes, chants, ballets), distributions de documents en français et en langue (dépliants, brochures, bulletins d’information) sur les OGM et sur les avantages du coton bio…

- L’Organisation d’une marche de protestation contre l’introduction des cultures transgéniques au Burkina Faso à Ouagadougou avec remise d’une déclaration et d’une demande de moratoire au Gouvernement.

- Des ateliers d’échanges inter paysans et des ateliers d’échanges avec des élus locaux ont été mis en place afin de favoriser le dialogue entre les élus et les producteurs de coton.

- Des visites de fermes agro écologiques afin de démontrer la viabilité de ces projets alternatifs.

- Conférences de presse, interviews des caravaniers, une campagne de communication médiatique pour toucher un large public. Tous les évènements ont été relayés par la presse nationale et internationale.

Objectifs atteints

Au total se sont plusieurs milliers de paysans et plus de 80 élus qui ont été touchés à Fada, à Dandé, Koumbia, et Houndé. La marche populaire a regroupé plus de 1000 personnes (organisations de producteurs, organisations de la société civile, Membres COPAGEN, les délégations étrangères…) dans les rues de Ouagadougou.

La caravane a permis de démystifier les OGM et surtout de lancer le débat public sur la question. Elle a aussi permis un éveil de la conscience populaire sur la question des OGM. Depuis le passage de la caravane, la COPAGEN/Burkina est très sollicitée pour des séances d’information et de sensibilisation au OGM dans les universités, par des organisations, par la presse... Certains producteurs initialement acquis à la cause du coton Bt, on clairement dit : « nous ne savions pas que c’était çà les OGM ! On ne nous l’avait pas expliqué ». D’autres sont allés jusqu’à réclamer la destitution des responsables de leurs organisations.

La caravane a suscité beaucoup de polémiques au sein des autorités politiques. Après la marche de protestation, certains responsables ont voulu empêcher la poursuite de la caravane surtout dans la ville de Bobo où les autorités ont en dernière minute boycotté l’activité mais aussi pour l’étape de Houndé où les autorités ont voulu interdire le passage de la caravane. Cette localité est connue pour être le fief d’un responsable de l’Union Nationale des Producteurs de Coton dont les dirigeants sont de mèche avec les autorités et les industries biotechnologiques pour l’introduction du coton Bt.

Globalement, partout où est passée la caravane les personnes rencontrées ont toutes montré la même surprise et la même colère face à l’absence d’information publique sur les OGM, un participant résumait le problème ainsi : « si c’est çà les OGM, nous n’en voulons pas ! Est ce que nos responsables travaillent vraiment pour notre bien ? Il faut dès à présent introduire partout l’information et la sensibilisation sur les OGM, les OGM ne passeront jamais par l’Afrique… ».

Source : COPAGEN, Afrique de l"ouest.

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